La Covid-19 est-elle une maladie professionnelle?

Afrilead - Le Covid 19 est-elle une maladie professionnelle

Eric est un jeune infirmier, qui passe près de 08  heures par jour au contact des malades. Mais depuis que la covid-19 a fait surface, il passe désormais plus de 12 heures par jour à l’hôpital pour assurer la prise en charge du flux croissant de patients. Il les rassure puisque ces derniers sont très souvent isolés, il est la main tendue et l’épaule sur laquelle ils pleurent. Il doit parfois dire oui à une accolade ou donner  une poignée de main rassurante à un patient mourant au nom de son humanité, ceci malgré les consignes de distanciation sociale. Il est devenu leur héros ! Mais au bout d’un mois, le jeune infirmier commence à ressentir les même symptômes que ses patients et finit par les rejoindre dans une unité de soins intensifs, testé positif à la Covid-19. Comme lui, plus de 90 000 soignants sont touchés par la Covid-19 dans le monde, a estimé au jour du 6 mai 2020, le Conseil international des infirmières (CII), tout en soulignant que le chiffre pourrait être deux fois plus élevé. Pour l’institut supérieur de la santé (ISS), environ 10% des contaminés appartiennent au corps médical.

Le taux de contamination du personnel médical serait 6 fois plus élevé que celui des individus lambda. Ces chiffres sont clairs ! Les membres du corps médical sont clairement les plus exposés du fait de leur activité qui les met constamment en contact avec des personnes malades. La propagation du virus a emporté la mise en place de mesures barrières afin de freiner son évolution telles que la distanciation sociale, le port du masque, la priorisation du télétravail, le confinement … toutefois celles-ci ont tôt fait de présenter quelques limites puisque certains corps de métiers exercent essentiellement leur activité par contact physique direct avec leur clientèle, ce qui est le cas du personnel de santé. Comment garder ses distances vis-à-vis d’un malade qui a besoin de réconfort ? Comment ausculter un malade à travers un écran…cela semble parfaitement  chimérique. Même si la psychose a gagné un grand nombre de personnes, les sentiments humains dont sont dotés les êtres humains rendent surréaliste le respect de certaines de ces recommandations dans un hôpital. Cet état de choses suscite des interrogations quant au statut de la Covid-19 par rapport aux maladies professionnelles (maladies contractées dans l’exercice d’une activité professionnelle). Les avis sont mitigés sur la question : d’une part, nous avons ceux qui estiment que par rapport au corps médical, la Covid-19 est sans aucun doute une maladie professionnelle et d’autre part, d’aucun estiment que dans la mesure où il est impossible de déterminer avec certitude que la maladie a bel et bien été contractée à l’hôpital, il serait exagéré de considérer cette dernière comme une maladie professionnelle. Il faut reconnaître qu’aucune des parties n’est en tort. Les voies de contagion étant nombreuses (transports en commun, contact avec la famille ou le voisinage, supermarchés…) il devient malaisé voire impossible de dire avec exactitude où et quand un individu a été contaminé, or les maladies professionnelles tiennent leur statut en partie de par le lien de causalité certain entre l’activité professionnelle et l’apparition de la maladie. En toute logique, il serait difficile d’octroyer la qualité de maladie professionnelle à une maladie que l’on peut contracter partout.

Que dis le législateur à ce sujet ? Une maladie peut être qualifiée de professionnelle sur la base de 3 critères : – sa présence dans le tableau de maladie professionnelle, – le fait qu’elle soit contractée dans les conditions prévues (niveau d’exposition, risque…), – l’existence d’un lien de cause à effet certain entre l’activité professionnelle et la maladie puis ses conséquences (décès ou une incapacité). A priori, cette dernière hypothèse paraît peu utilisable dans le cas d’une infection par Corona virus, puisqu’on sait qu’elle n’occasionne pas d’incapacité permanente. D’autre part, il faut noter que la maladie étant nouvelle, ne figure pas encore dans des tableaux de maladie professionnelle. En avril dernier, le ministre français de la santé a levé toute équivoque en indiquant que la reconnaissance de la Covid-19 en tant que maladie professionnelle serait systématique et automatique, pour tout membre du corps médical qui en serait atteint dans sa forme sévère. A cet effet, un nouveau tableau de maladies professionnelles dédié à la Covid-19 sera publié. Il concernera les soignants des établissements sanitaires et médico-sociaux, le personnel non-soignant travaillant en présentiel dans ces structures, les personnes assurant le transport et l’accompagnement des personnes atteintes de la covid-19 ainsi que les professionnels de santé libéraux. Pour le cas des autres travailleurs atteints de la Covid-19 dans sa forme sévère, ayant travaillé en présentiel pendant le confinement, la procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle sera facilitée : un comité unique de reconnaissance national dédié à la Covid-19 sera constitué pour assurer l’homogénéité du traitement des demandes et aucun taux d’incapacité permanente ne sera exigé pour cette reconnaissance. Les employeurs concernés n’auront pas à supporter seuls la charge financière de l’indemnisation puisqu’elle sera assurée via la part mutualisée de leur cotisation accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP). Pour les professionnels libéraux, qui ne bénéficient pas d’une couverture au titre des maladies professionnelles, l’Etat assurera leur indemnisation.

En simplifiant la procédure de reconnaissance d’une maladie professionnelle au titre de la Covid-19, le gouvernement prend en compte l’exposition particulière à laquelle ont été soumis, d’une part, les soignants et, d’autre part, les salariés ayant continué à travailler en présentiel pendant la période de confinement. Aujourd’hui il est plus qu’évident que la Covid-19 a gagné sa place parmi les maladies professionnelles, l’OIT le reconnait d’ailleurs implicitement dans sa convention n° 121 « les maladies infectieuses ou parasitaires contractées dans une activité comportant un risque particulier de contamination peuvent être considérées comme des maladies professionnelles… ».Encore faudrait-il que les Etats membres mettent en place les mécanismes adéquats afin de rendre effective cette reconnaissance sur leurs territoires. Sources :

Rédigé par Merveille MANANGA, QHSE Project officer

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